Accueil Biographie Personnages Contact Sites partenaires
»L'Étourdi ou les contretemps
»Les Precieuses ridicules
»Le Dépit Amoureux
»Sganarelle ou le cocu imaginaire
»Dom Garcie de Navarre ou le Prince jaloux
»L'École des maris
»Les Fâcheux
»L'École des femmes
»La Critique de L'École des femmes
»L'Impromptu de Versailles
»Le mariage forcé
»La Princesse d'Élide
»Le Tartuffe ou l'Imposteur
»Dom Juan ou le Festin de pierre
»L'Amour Médecin
»Le Misanthrope
»Le médecin malgré lui
»Mélicerte
»Pastorale comique
»Le Sicilien ou l'Amour peintre
»Amphitryon
»George Dandin ou le mari confondu
»L'Avare
»Monsieur de Pourceaugnac
»Les amants magnifiques
»Le bourgeois gentilhomme
»Psyché
»Les fourberies de Scapin
»La Comtesse d'Escarbagnas
»Les Femmes savantes
»Le Malade imaginaire
     
Actes de l'oeuvre
George Dandin ou le mari confondu :

¤Acte 1
¤Acte 2
¤Acte 3
ºSCÈNE PREMIÈRE
ºSCÈNE II
ºSCÈNE III
ºSCÈNE IV
ºSCÈNE V
ºSCÈNE VI
ºSCÈNE VII
ºSCÈNE VIII
 
 

 

George Dandin ou le mari confondu » Acte 3 » SCÈNE VII

MONSIEUR ET MADAME DE SOTENVILLE, COLIN, CLAUDINE, ANGÉLIQUE, GEORGE DANDIN.

Monsieur et madame de Sotenville sont en des habits de nuit,et conduits par Colin, qui porte une lanterne.

ANGÉLIQUE.- Approchez de grâce, et venez me faire raison de l'insolence la plus grande du monde, d'un mari à qui le vin et la jalousie ont troublé de telle sorte la cervelle, qu'il ne sait plus ni ce qu'il dit, ni ce qu'il fait, et vous a lui-même envoyé querir pour vous faire témoins de l'extravagance la plus étrange dont on ait jamais ouï parler. Le voilà qui revient comme vous voyez, après s'être fait attendre toute la nuit, et si vous voulez l'écouter, il vous dira qu'il a les plus grandes plaintes du monde à vous faire de moi; que durant qu'il dormait, je me suis dérobée d'auprès de lui pour m'en aller courir, et cent autres contes de même nature qu'il est allé rêver.

GEORGE DANDIN.- Voilà une méchante carogne.

CLAUDINE.- Oui, il nous a voulu faire accroire qu'il était dans la maison, et que nous étions dehors, et c'est une folie qu'il n'y a pas moyen de lui ôter de la tête.

MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Comment, qu'est-ce à dire cela?

MADAME DE SOTENVILLE.- Voilà une furieuse impudence que de nous envoyer querir.

GEORGE DANDIN.- Jamais...

ANGÉLIQUE.- Non, mon père, je ne puis plus souffrir un mari de la sorte. Ma patience est poussée à bout, et il vient de me dire cent paroles injurieuses.

MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Corbleu vous êtes un malhonnête homme.

CLAUDINE *.- C'est une conscience de voir une pauvre jeune femme traitée de la façon, et cela crie vengeance au Ciel.

GEORGE DANDIN.- Peut-on...

MADAME DE SOTENVILLE.- Allez, vous devriez mourir de honte.

GEORGE DANDIN.- Laissez-moi vous dire deux mots.

ANGÉLIQUE.- Vous n'avez qu'à l'écouter, il va vous en conter de belles.

GEORGE DANDIN.- Je désespère.

CLAUDINE.- Il a tant bu, que je ne pense pas qu'on puisse durer contre lui, et l'odeur du vin qu'il souffle est montée jusqu'à nous.

GEORGE DANDIN.- Monsieur mon beau-père, je vous conjure...

MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Retirez-vous. Vous puez le vin à pleine bouche.

GEORGE DANDIN.- Madame, je vous prie...

MADAME DE SOTENVILLE.- Fi ne m'approchez pas. Votre haleine est empestée.

GEORGE DANDIN.- Souffrez que je vous...

MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Retirez-vous, vous dis-je. On ne peut vous souffrir.

GEORGE DANDIN.- Permettez de grâce que...

MADAME DE SOTENVILLE.- Poua, vous m'engloutissez le cœur*. Parlez de loin, si vous voulez.

GEORGE DANDIN.- Hé bien oui, je parle de loin. Je vous jure que je n'ai bougé de chez moi, et que c'est elle qui est sortie.

ANGÉLIQUE.- Ne voilà pas ce que je vous ai dit?

CLAUDINE.- Vous voyez quelle apparence* il y a.

MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Allez. Vous vous moquez des gens. Descendez, ma fille, et venez ici.

GEORGE DANDIN.- J'atteste le Ciel, que j'étais dans la maison, et que...

MADAME DE SOTENVILLE.- Taisez-vous, c'est une extravagance qui n'est pas supportable.

GEORGE DANDIN.- Que la foudre m'écrase tout à l'heure, si...

MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Ne nous rompez pas davantage la tête et songez à demander pardon à votre femme.

GEORGE DANDIN.- Moi demander pardon?

MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Oui pardon, et sur-le-champ.

GEORGE DANDIN.- Quoi je...

MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Corbleu si vous me répliquez. Je vous apprendrai ce que c'est que de vous jouer à nous.

GEORGE DANDIN.- Ah George Dandin!

MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Allons, venez, ma fille, que votre mari vous demande pardon.

ANGÉLIQUE, descendue.- Moi? lui pardonner tout ce qu'il m'a dit? Non, non, mon père, il m'est impossible de m'y résoudre, et je vous prie de me séparer d'un mari avec lequel je ne saurais plus vivre.

CLAUDINE.- Le moyen d'y résister?

MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Ma fille, de semblables séparations ne se font point sans grand scandale, et vous devez vous montrer plus sage que lui, et patienter encore cette fois.

ANGÉLIQUE.- Comment patienter après de telles indignités? Non, mon père, c'est une chose où je ne puis consentir.

MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Il le faut, ma fille, et c'est moi qui vous le commande.

ANGÉLIQUE.- Ce mot me ferme la bouche, et vous avez sur moi une puissance absolue.

CLAUDINE.- Quelle douceur!

ANGÉLIQUE.- Il est fâcheux d'être contrainte d'oublier de telles injures, mais quelque violence que je me fasse, c'est à moi de vous obéir.

CLAUDINE.- Pauvre mouton!

MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Approchez.

ANGÉLIQUE.- Tout ce que vous me faites faire ne servira de rien, et vous verrez que ce sera dès demain à recommencer.

MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Nous y donnerons ordre. Allons, mettez-vous à genoux.

GEORGE DANDIN.- À genoux?

MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Oui à genoux, et sans tarder.

GEORGE DANDIN. Il se met à genoux..- Ô Ciel! Que faut-il dire?

MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Madame, je vous prie de me pardonner.

GEORGE DANDIN.- Madame, je vous prie de me pardonner.

MONSIEUR DE SOTENVILLE.- L'extravagance que j'ai faite.

GEORGE DANDIN.- L'extravagance que j'ai faite (à part) de vous épouser.

MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Et je vous promets de mieux vivre à l'avenir.

GEORGE DANDIN.- Et je vous promets de mieux vivre à l'avenir.

MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Prenez-y garde, et sachez que c'est ici la dernière de vos impertinences que nous souffrirons.

MADAME DE SOTENVILLE.- Jour de Dieu, si vous y retournez, on vous apprendra le respect que vous devez à votre femme, et à ceux de qui elle sort.

MONSIEUR DE SOTENVILLE.- Voilà le jour qui va paraître. Adieu. Rentrez chez vous, et songez bien à être sage. Et nous, mamour, allons nous mettre au lit.