George Dandin ou le mari confondu » Acte 3 » SCÈNE PREMIÈRE
CLITANDRE, LUBIN.CLITANDRE.- La nuit est avancée, et j'ai peur qu'il ne soit trop tard. Je ne vois point à me conduire. Lubin!LUBIN.- Monsieur?CLITANDRE.- Est-ce par ici?LUBIN.- Je pense que oui. Morgué voilà une sotte nuit, d'être si noire que cela.CLITANDRE.- Elle a tort assurément. Mais si d'un côté elle nous empêche de voir, elle empêche de l'autre que nous ne soyons vus.LUBIN.- Vous avez raison. Elle n'a pas tant de tort. Je voudrais bien savoir, Monsieur, vous qui êtes savant, pourquoi il ne fait point jour la nuit?CLITANDRE.- C'est une grande question, et qui est difficile. Tu es curieux, Lubin.LUBIN.- Oui. Si j'avais étudié, j'aurais été songer à des choses où on n'a jamais songé.CLITANDRE.- Je le crois. Tu as la mine d'avoir l'esprit subtil et pénétrant.LUBIN.- Cela est vrai. Tenez. J'explique du latin, quoique jamais je ne l'aie appris, et voyant l'autre jour écrit sur une grande porte collegium, je devinai que cela voulait dire collège.CLITANDRE.- Cela est admirable! Tu sais donc lire, Lubin?LUBIN.- Oui. Je sais lire la lettre moulée*, mais je n'ai jamais su apprendre à lire l'écriture.CLITANDRE.- Nous voici contre la maison. C'est le signal que m'a donné Claudine.LUBIN.- Par ma foi c'est une fille qui vaut de l'argent, et je l'aime de tout mon cœur.CLITANDRE.- Aussi t'ai-je amené avec moi pour l'entretenir.LUBIN.- Monsieur, je vous suis...CLITANDRE.- Chut. J'entends quelque bruit.
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