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Actes de l'oeuvre
Les amants magnifiques :

¤Prologue
¤Acte I
¤Acte II
ºSCÈNE PREMIÈRE
ºSCÈNE II
ºSCÈNE III
ºSCÈNE IV
ºSCÈNE V
¤Acte III
¤Acte IV
¤Acte V
 
 

 

Les amants magnifiques » Acte II » SCÈNE V

ARISTIONE, IPHICRATE, TIMOCLÈS, ANAXARQUE, CLITIDAS, SOSTRATE, ÉRIPHILE.

ARISTIONE. - On vous a demandée, ma fille, et il y a des gens que votre absence chagrine fort.

ÉRIPHILE. - Je pense, Madame, qu'on m'a demandée par compliment, et on ne s'inquiète pas tant qu'on vous dit.

ARISTIONE. - On enchaîne pour nous ici tant de divertissements les uns aux autres, que toutes nos heures sont retenues, et nous n'avons aucun moment à perdre, si nous voulons les goûter tous. Entrons vite dans le bois, et voyons ce qui nous y attend; ce lieu est le plus beau du monde, prenons vite nos places.
Fin du second acte

TROISIÈME INTERMÈDE

Le théâtre est une forêt, où la princesse est invitée d'aller; une nymphe lui en fait les honneurs en chantant, et pour la divertir on lui joue une petite comédie en musique, dont voici le sujet: un berger se plaint à deux bergers ses amis, des froideurs de celle qu'il aime; les deux amis le consolent; et comme la bergère aimée arrive, tous trois se retirent pour l'observer: après quelque plainte amoureuse elle se repose sur un gazon, et s'abandonne aux douceurs du sommeil; l'amant fait approcher ses amis pour contempler les grâces de sa bergère, et invite toutes choses à contribuer à son repos. La bergère en s'éveillant, voit son berger à ses pieds, se plaint de sa poursuite: mais considérant sa constance elle lui accorde sa demande, et consent d'en être aimée en présence des deux bergers amis: deux satyres arrivant se plaignent de son changement, et étant touchés de cette disgrâce, cherchent leur consolation dans le vin.

LES PERSONNAGES DE LA PASTORALE

LA NYMPHE DE LA VALLÉE DE TEMPÉ.
TIRCIS.
LYCASTE.
MÉNANDRE.
CALISTE.
DEUX SATYRES

PROLOGUE

LA NYMPHE DE TEMPÉ

Venez, grande Princesse, avec tous vos appas,
Venez prêter vos yeux aux innocents ébats
Que notre désert vous présente;
N'y cherchez point l'éclat des fêtes de la cour,
On ne sent ici que l'amour,
Ce n'est que d'amour qu'on y chante.

SCÈNE PREMIÈRE

TIRCIS

Vous chantez sous ces feuillages,
Doux rossignols pleins d'amour,
Et de vos tendres ramages
Vous réveillez tour à tour
Les échos de ces bocages:
Hélas! petits oiseaux, hélas!
Si vous aviez mes maux, vous ne chanteriez pas.

SCÈNE II

LYCASTE, MÉNANDRE, TIRCIS.

LYCASTE

Hé quoi toujours languissant, sombre et triste?

MÉNANDRE

Hé quoi toujours aux pleurs abandonné?

TIRCIS

Toujours adorant Caliste,
Et toujours infortuné.

LYCASTE

Dompte, dompte, berger, l'ennui* qui te possède.

TIRCIS

Eh le moyen? hélas!

MÉNANDRE

Fais, fais-toi quelque effort.

TIRCIS

Eh le moyen, hélas! quand le mal est trop fort?

LYCASTE

Ce mal trouvera son remède.

TIRCIS

Je ne guérirai qu'à ma mort.

LYCASTE et MÉNANDRE

Ah Tircis!

TIRCIS

Ah bergers!

LYCASTE et MÉNANDRE

Prends sur toi plus d'empire.

TIRCIS

Rien ne me peut secourir.

LYCASTE et MÉNANDRE

C'est trop, c'est trop céder.

TIRCIS

C'est trop, c'est trop souffrir.

LYCASTE et MÉNANDRE

Quelle faiblesse!

TIRCIS

Quel martyre!

LYCASTE et MÉNANDRE

Il faut prendre courage.

TIRCIS

Il faut plutôt mourir.

LYCASTE

Il n'est point de bergère
Si froide, et si sévère,
Dont la pressante ardeur
D'un cœur qui persévère
Ne vainque la froideur.

MÉNANDRE

Il est, dans les affaires
Des amoureux mystères,
Certains petits moments
Qui changent les plus fières,
Et font d'heureux amants.

TIRCIS

Je la vois, la cruelle,
Qui porte ici ses pas,
Gardons d'être vu d'elle,
L'ingrate, hélas!
N'y viendrait pas.

SCÈNE III

CALISTE

Ah que sur notre cœur
La sévère loi de l'honneur
Prend un cruel empire!
Je ne fais voir que rigueurs pour Tircis,
Et cependant, sensible à ses cuisants soucis,
De sa langueur en secret je soupire,
Et voudrais bien soulager son martyre.
C'est à vous seuls que je le dis,
Arbres, n'allez pas le redire.
Puisque le Ciel a voulu nous former
Avec un cœur qu'amour peut enflammer,
Quelle rigueur impitoyable
Contre des traits si doux nous force à nous armer,
Et pourquoi sans être blâmable
Ne peut-on pas aimer
Ce que l'on trouve aimable?
Hélas! que vous êtes heureux
Innocents animaux, de vivre sans contrainte,
Et de pouvoir suivre sans crainte
Les doux emportements de vos cœurs amoureux:
Hélas! petits oiseaux, que vous êtes heureux
De ne sentir nulle contrainte,
Et de pouvoir suivre sans crainte
Les doux emportements de vos cœurs amoureux*.
Mais le sommeil sur ma paupière
Verse de ses pavots l'agréable fraîcheur,
Donnons-nous à lui toute entière,
Nous n'avons point de loi sévère
Qui défende à nos sens d'en goûter la douceur.

SCÈNE IV

CALISTE, endormie, TIRCIS, LYCASTE, MÉNANDRE.

TIRCIS

Vers ma belle ennemie
Portons sans bruit nos pas,
Et ne réveillons pas
Sa rigueur endormie.

TOUS TROIS

Dormez, dormez, beaux yeux, adorables vainqueurs,
Et goûtez le repos que vous ôtez aux cœurs,
Dormez, dormez, beaux yeux.

TIRCIS

Silence, petits oiseaux,
Vents, n'agitez nulle chose,
Coulez doucement, ruisseaux,
C'est Caliste qui repose.

TOUS TROIS

Dormez, dormez, beaux yeux, adorables vainqueurs,
Et goûtez le repos que vous ôtez aux cœurs,
Dormez, dormez, beaux yeux.

CALISTE

Ah quelle peine extrême!
Suivre partout mes pas!

TIRCIS

Que voulez-vous qu'on suive, hélas!
Que ce qu'on aime?

CALISTE

Berger que voulez-vous?

TIRCIS

Mourir, belle bergère,
Mourir à vos genoux,
Et finir ma misère,
Puisque en vain à vos pieds on me voit soupirer,
Il y faut expirer.

CALISTE

Ah Tircis, ôtez-vous, j'ai peur que dans ce jour
La pitié dans mon cœur n'introduise l'amour.

LYCASTE et MÉNANDRE, l'un après l'autre.

Soit amour, soit pitié,
Il sied bien d'être tendre;
C'est par trop vous défendre
Bergère, il faut se rendre
À sa longue amitié,
Soit amour, soit pitié,
Il sied bien d'être tendre.

CALISTE

C'est trop, c'est trop de rigueur,
J'ai maltraité votre ardeur
Chérissant votre personne,
Vengez-vous de mon cœur
Tircis, je vous le donne.

TIRCIS

Ô Ciel! Bergers! Caliste! ah je suis hors de moi!
Si l'on meurt de plaisir je dois perdre la vie.

LYCASTE

Digne prix de ta foi!

MÉNANDRE

Ô sort digne d'envie!

SCÈNE V

DEUX SATIRES, TIRCIS, LYCASTE, CALISTE, MÉNANDRE.

PREMIER SATYRE

Quoi tu me fuis, ingrate, et je te vois ici
De ce berger à moi faire une préférence?

DEUXIÈME SATYRE

Quoi mes soins n'ont rien pu sur ton indifférence,
Et pour ce langoureux ton cœur s'est adouci?

CALISTE

Le destin le veut ainsi,
Prenez tous deux patience.

PREMIER SATYRE

Aux amants qu'on pousse à bout
L'amour fait verser des larmes:
Mais ce n'est pas notre goût,
Et la bouteille a des charmes
Qui nous consolent de tout.

DEUXIÈME SATYRE

Notre amour n'a pas toujours
Tout le bonheur qu'il désire:
Mais nous avons un secours,
Et le bon vin nous fait rire
Quand on rit de nos amours.

TOUS

Champêtres divinités,
Faunes, dryades, sortez
De vos paisibles retraites;
Mêlez vos pas à nos sons,
Et tracez sur les herbettes
L'image de nos chansons.

PREMIÈRE ENTRÉE DE BALLET

En même temps six dryades et six faunes sortent de leurs demeures, et font ensemble une danse agréable, qui s'ouvrant tout d'un coup, laisse voir un berger et une bergère, qui font en musique une petite scène d'un dépit amoureux.

DÉPIT AMOUREUX

CLIMÈNE, PHILINTE.

PHILINTE

Quand je plaisais à tes yeux
J'étais content de ma vie,
Et ne voyais Roi ni Dieux
Dont le sort me fît envie.

CLIMÈNE

Lors qu'à toute autre personne
Me préférait ton ardeur,
J'aurais quitté la couronne
Pour régner dessus ton cœur.

PHILINTE

Une autre a guéri mon âme
Des feux que j'avais pour toi.

CLIMÈNE

Un autre a vengé ma flamme
Des faiblesses de ta foi.

PHILINTE

Cloris qu'on vante si fort,
M'aime d'une ardeur fidèle,
Si ses yeux voulaient ma mort
Je mourrais content pour elle.

CLIMÈNE

Myrtil si digne d'envie,
Me chérit plus que le jour,
Et moi je perdrais la vie
Pour lui montrer mon amour.

PHILINTE

Mais si d'une douce ardeur
Quelque renaissante trace
Chassait Cloris de mon cœur
Pour te remettre en sa place...

CLIMÈNE

Bien qu'avec pleine tendresse
Myrtil me puisse chérir,
Avec toi, je le confesse,
Je voudrais vivre et mourir.

TOUS DEUX ensemble.

Ah plus que jamais aimons-nous,
Et vivons et mourons en des liens si doux.

TOUS LES ACTEURS DE LA COMÉDIE chantent.

Amants, que vos querelles
Sont aimables et belles,
Qu'on y voit succéder
De plaisirs, de tendresse,
Querellez-vous sans cesse
Pour vous raccommoder !
Amants, que vos querelles
Sont aimables et belles, etc.

DEUXIÈME ENTRÉE DE BALLET

Les faunes et les dryades recommencent leur danse, que les bergères et bergers musiciens entremêlent de leurs chansons, tandis que trois petites dryades, et trois petits faunes, font paraître* dans l'enfoncement du théâtre tout ce qui se passe sur le devant.

LES BERGERS et BERGÈRES

Jouissons, jouissons des plaisirs innocents
Dont les feux de l'amour savent charmer nos sens,
Des grandeurs, qui voudra se soucie,
Tous ces honneurs dont on a tant d'envie,
Ont des chagrins qui sont vieillissants*:
Jouissons, jouissons des plaisirs innocents
Dont les feux de l'amour savent charmer nos sens.
En aimant, tout nous plaît dans la vie,
Deux cœurs unis de leur sort sont contents,
Cette ardeur, de plaisirs suivie,
De tous nos jours fait d'éternels printemps:
Jouissons, jouissons des plaisirs innocents
Dont les feux de l'amour savent charmer nos sens.