Le bourgeois gentilhomme » Acte 3 » SCÈNE V
DORANTE, MADAME JOURDAIN, NICOLE.DORANTE.- Vous me semblez toute mélancolique: qu'avez-vous, Madame Jourdain?MADAME JOURDAIN.- J'ai la tête plus grosse que le poing, et si* elle n'est pas enflée.DORANTE.- Mademoiselle votre fille, où est-elle, que je ne la vois point?MADAME JOURDAIN.- Mademoiselle ma fille est bien où elle est.DORANTE.- Comment se porte-t-elle?MADAME JOURDAIN.- Elle se porte sur ses deux jambes.DORANTE.- Ne voulez-vous point un de ces jours venir voir avec elle, le ballet et la comédie que l'on fait chez le Roi?MADAME JOURDAIN.- Oui vraiment, nous avons fort envie de rire, fort envie de rire nous avons.DORANTE.- Je pense, Madame Jourdain, que vous avez eu bien des amants dans votre jeune âge, belle et d'agréable humeur comme vous étiez.MADAME JOURDAIN.- Trédame*, Monsieur, est-ce que Madame Jourdain est décrépite, et la tête lui grouille-t-elle* déjà?DORANTE.- Ah, ma foi, Madame Jourdain, je vous demande pardon. Je ne songeais pas que vous êtes jeune, et je rêve* le plus souvent. Je vous prie d'excuser mon impertinence.
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