La Princesse d'Élide » Troisième intermède » SCÈNE II
SATYRE, MORON.SATYRE.— La, la, la.MORON.— Ah! Satyre mon ami, tu sais bien ce que tu m'as promis, il y a longtemps, apprends-moi à chanter, je te prie?SATYRE.— Je le veux; mais auparavant écoute une chanson que je viens de faire.MORON.— Il est si accoutumé à chanter qu'il ne saurait parler d'autre façon. Allons chante, j'écoute.SATYRE.— Je portais...MORON.— Une chanson, dis-tu?SATYRE.— Je port...MORON.— Une chanson à chanter ?SATYRE.— Je port...MORON.— Chanson amoureuse, peste.SATYREJe portais dans une cageDeux moineaux que j'avais pris;Lorsque la jeune ClorisFit dans un sombre bocageBriller, à mes yeux surpris,Les fleurs de son beau visage:Hélas! dis-je aux moineaux, en recevant les coups,De ses yeux si savants à faire des conquêtes,Consolez-vous, pauvres petites bêtes,Celui qui vous a pris est bien plus pris que vous. Moron ne fut pas satisfait de cette chanson, quoiqu'il la trouvât jolie, il en demanda une plus passionnée, et priant le satyre de lui dire celle qu'il lui avait ouï chanter quelques jours auparavant, il continua ainsi:Dans vos chants si doux,Chantez à ma belle,Oiseaux, chantez tousMa peine mortelle:Mais si la cruelleSe met en courrouxAu récit fidèleDes maux que je sens pour elle;Oiseaux, taisez-vous.Oiseaux, taisez-vous. Cette seconde chanson ayant touché Moron fort sensiblement, il pria le satyre de la lui apprendre à chanter; et lui dit:MORON.— Ah qu'elle est belle! Apprends-la-moi?SATYRE.— La, la, la, la.MORON.— La, la, la, la.SATYRE.— Fa, fa, fa, fa.MORON.— Fa toi-même*.Le satyre s'en mit en colère, et peu à peu se mettant en posture d'en venir à des coups de poing, les violons reprirent un air sur lequel ils dansèrent une plaisante entrée.
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