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Actes de l'oeuvre
La Princesse d'Élide :

¤Premier intermède
¤ Acte I
¤Deuxième intermède
¤Acte II
ºARGUMENT
ºSCÈNE PREMIÈRE
ºAVIS
ºSCÈNE II
ºSCÈNE III
ºSCÈNE IV
¤Troisième intermède
¤Acte III
¤Quatrième intermède
¤Acte IV
¤Cinquième intermède
¤Acte V
¤Sixième intermède
 
 

 

La Princesse d'Élide » Acte II » SCÈNE IV

LE PRINCE, EURYALE, ARISTOMÈNE, THÉOCLE, LA PRINCESSE, AGLANTE, CYNTHIE, PHILIS, MORON.


LA PRINCESSE.- Seigneur, je vous demande la licence de prévenir par deux paroles la déclaration des pensées que vous pouvez avoir. Il y a deux vérités, Seigneur, aussi constantes l'une que l'autre, et dont je puis vous assurer également: l'une que vous avez un absolu pouvoir sur moi, et que vous ne sauriez m'ordonner rien où je ne réponde aussitôt par une obéissance aveugle. L'autre que je regarde l'hyménée ainsi que le trépas, et qu'il m'est impossible de forcer cette aversion naturelle: me donner un mari, et me donner la mort c'est une même chose; mais votre volonté va la première, et mon obéissance m'est bien plus chère que ma vie: après cela parlez, Seigneur, prononcez librement ce que vous voulez.


LE PRINCE.- Ma fille, tu as tort de prendre de telles alarmes, et je me plains de toi, qui peux mettre dans ta pensée que je sois assez mauvais père pour vouloir faire violence à tes sentiments, et me servir tyranniquement de la puissance que le Ciel me donne sur toi. Je souhaite à la vérité que ton cœur puisse aimer quelqu'un: tous mes vœux seraient satisfaits si cela pouvait arriver, et je n'ai proposé les fêtes et les jeux que je fais célébrer ici, qu'afin d'y pouvoir attirer tout ce que la Grèce a d'illustre; et que parmi cette noble jeunesse, tu puisses enfin rencontrer où arrêter tes yeux et déterminer tes pensées. Je ne demande, dis-je, au Ciel autre bonheur que celui de te voir un époux: j'ai pour obtenir cette grâce fait encore ce matin un sacrifice à Vénus; et si je sais bien expliquer le langage des dieux, elle m'a promis un miracle: mais quoi qu'il en soit je veux en user avec toi en père, qui chérit sa fille: si tu trouves où attacher tes vœux, ton choix sera le mien, et je ne considérerai ni intérêts d'Etat, ni avantages d'alliance. Si ton cœur demeure insensible, je n'entreprendrai point de le forcer: mais au moins sois complaisante aux civilités qu'on te rend, et ne m'oblige point à faire les excuses de ta froideur: traite ces princes avec l'estime que tu leur dois, reçois avec reconnaissance les témoignages de leur zèle, et viens voir cette course où leur adresse va paraître.


THÉOCLE.- Tout le monde va faire des efforts pour remporter* le prix de cette course; mais à vous dire vrai j'ai peu d'ardeur pour la victoire, puisque ce n'est pas votre cœur qu'on y doit disputer.


ARISTOMÈNE.- Pour moi, Madame, vous êtes le seul prix que je me propose partout: c'est vous que je crois disputer dans ces combats d'adresse, et je n'aspire maintenant à remporter l'honneur de cette course, que pour obtenir un degré de gloire qui m'approche de votre cœur.


EURYALE.- Pour moi, Madame, je n'y vais point du tout avec cette pensée: comme j'ai fait toute ma vie profession de ne rien aimer, tous les soins que je prends ne vont point où tendent les autres: je n'ai aucune prétention sur votre cœur, et le seul honneur de la course est tout l'avantage où j'aspire.


Ils la quittent.


LA PRINCESSE.- D'où sort cette fierté où l'on ne s'attendait point? Princesses, que dites-vous de ce jeune prince? Avez-vous remarqué de quel ton il l'a pris?


AGLANTE.- Il est vrai que cela est un peu fier.


MORON.- Ah! quelle brave botte il vient là de lui porter!


LA PRINCESSE.- Ne trouvez-vous pas qu'il y aurait plaisir d'abaisser son orgueil, et de soumettre un peu ce cœur qui tranche tant du brave?


CYNTHIE.- Comme vous êtes accoutumée à ne jamais recevoir que des hommages et des adorations de tout le monde, un compliment pareil au sien doit vous surprendre à la vérité.


LA PRINCESSE.- Je vous avoue que cela m'a donné de l'émotion, et que je souhaiterais fort de trouver les moyens de châtier cette hauteur. Je n'avais pas beaucoup d'envie de me trouver à cette course; mais j'y veux aller exprès, et employer toute chose pour lui donner de l'amour.


CYNTHIE.- Prenez garde, Madame, l'entreprise est périlleuse, et lorsqu'on veut donner de l'amour, on court risque d'en recevoir.


LA PRINCESSE.- Ah! n'appréhendez rien, je vous prie, allons, je vous réponds de moi.